Post by Mohini on Aug 16, 2020 16:58:44 GMT 1
Bonsoir à toutes,
J'ouvre ce topic car c'est une question récurrente : quelle voie est la meilleure pour l'estradiol ?
Sur le sujet, voici les légendes urbaines médicales auxquelles nous avons été confrontées et qui sont colportées tant par le monde médical que par les patientes elles-même :
- la voie cutanée est mieux car elle ne fatigue pas le foie
- la voie cutanée est mieux car elle présente moins de risque au niveau thrombo-embolique (thromboses veineuses profondes à type de phlébites ou embolies pulmonaires)
Comme nous le verrons, "la Vérité est ailleurs"....
1) la voie cutanée est-elle mieux au niveau hépatique ?
- pour mémoire, l'estradiol oral passe par voie hépatique et subit l'effet de premier passage hépatique qui correspond à la métabolisation primaire de l'estradiol par le foie. A l'inverse, l'estradiol cutané n'est pas soumis à effet de premier passage hépatique
- la question que l'on peut se poser : ce passage hépatique est-il si mauvais que ça? En effet, je rappelle pour mes lectrices assidues que l'estradiol a des effets inducteurs hépatiques en augmentant la synthèse de protéines hépatiques (comme la céruléoplasmine) ou en diminuant la synthèse de certaines protéines hépatiques (comme l'hepcidine).... dont j'ai parlé dans l'analogie entre Alchimie et Hormonologie
- la réponse est donnée par un document publié par le CNGOF (Conseil National des Gynéco-Obsétriciens de France) dont je vous donne le lien
www.cngof.net/Journees-CNGOF/MAJ-GO/livres/2008_GM_135_arnal.pdf
Dans ce document, en page 4, il y a cet extrait de texte intéressant :
"Chez la femme ménopausée, l’administration d’œstrogènes, associés ou non à un progestatif, influence la synthèse hépatique des lipoprotéines, mais également la clairance de certaines lipoparticules, avec une intensité variable en fonction du type et de la dose des œstrogènes utilisés et de leur voie d’administration.
Ainsi, l’ensemble des données de la littérature concordent pour affirmer que l’administration d’œstrogènes par voie orale se traduit par une réduction significative des taux de cholestérol LDL, mais également de Lp(a), et augmente de façon significative les taux de HDL et d’apolipoprotéine A1, mais également de triglycérides [56]. La principale explication de cette élévation du taux de triglycérides sous œstrogénothérapie orale repose sur l’augmentation de la production de particules VLDL de grande taille dont l’effet délétère semble limité en raison d’une épuration hépatique massive limitant leur conversion en lipoparticules athérogènes (VLDL de petite taille, LDL) [64].
Ces effets favorables des œstrogènes sur le métabolisme lipidique sont souvent moins marqués lors de l’administration par voie transdermique, du fait de l’absence de premier passage hépatique. Enfin, si les différents progestatifs ne modifient pas l’effet des œstrogènes sur le cholestérol LDL, l’acétate de médroxyprogestérone atténue leur effet bénéfique sur le cholestérol HDL, ce qui ne semble pas être le cas de la progestérone micronisée [45]"
J'ai surligné en rouge les éléments suivants : il en résulte que E2 par voie orale permet d'améliorer le bilan lipidique de façon considérable :
* en diminuant le risque athérogène lié au cholestérol : augmentation de la fraction de "bon" cholestérol (HDL cholestérol) et diminution du "mauvais" cholestérol (LDL cholestérol et Lp(a))
* en augmentant l'élimination des triglycérides associée aux particules à haut risque athérogène (particules dites VLDL)
Cet effet inducteur hépatique de E2 oral est bien entendu amoindri en cas d'administration cutanée de E2.
Seul hic : augmentation modérée des triglycérides donc à surveiller en cas de troubles métaboliques associés (diabète)
EN BREF : E2 oral meilleur que E2 cutané
2) augmentation du risque thrombo-embolique de l'estradiol oral ou pas ?
je vous donne le lien vers la base officielle de médicaments : base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr/
Elle permet de lire les fiches de chaque médicament (dont toutes les spécialités à base d'estradiol)
Il en résulte les éléments suivants :
- quelque soit la forme d'administration (orale, cutanée gel ou cutanée patch) : le risque relatif de développer un souci thrombo-embolique est de 1,3 à 3,0
- les facteurs de risque thrombo-embolique sont : âge avancé, obésité sévère (IMC > 30), immobilisation prolongée (ce qui explique l'arrêt du TH en pré et post-op immédiat)
EN BREF : aucune supériorité de E2 cutané sur E2 oral
3) conclusion
Cela montre bien le souci majeur des légendes urbaines médicales sans vérification des données médicales au préalable...
La forme orale est supérieure à la voie cutanée de par l'effet de premier passage hépatique en voie orale : E2 a un effet inducteur hépatique et donc diminue le risque cardiovasculaire athérogène sur le versant artériel. En revanche, il y a égalité entre les 2 voies d'administration pour le risque vasculaire sur le versant veineux (risque thrombo-embolique)
A ceci se rajoutent d'autres éléments de supériorité de la voie orale :
- possibilité de déterminer le moment du dosage sanguin, à l'inverse de la voie cutanée où l'absorption est variable
- absorption digestive stable à l'inverse de la voie cutanée qui est soumise aux aléas thermiques (température extérieure froide donc vasoconstriction cutanée d'où moindre absorption cutanée / température extérieure élevée ou effort physique important donc vasodilatation cutanée d'où absorption cutanée augmentée)
- en voie cutanée :
* mention spéciale pour les patchs : risque de décollement en cas de fortes chaleurs
* mention spéciale pour le gel : si vous êtes hétéro, lors de contacts rapprochés avec votre compagnon, vous risquez de lui faire absorber votre E2 gel
Bisous
Mohini
J'ouvre ce topic car c'est une question récurrente : quelle voie est la meilleure pour l'estradiol ?
Sur le sujet, voici les légendes urbaines médicales auxquelles nous avons été confrontées et qui sont colportées tant par le monde médical que par les patientes elles-même :
- la voie cutanée est mieux car elle ne fatigue pas le foie
- la voie cutanée est mieux car elle présente moins de risque au niveau thrombo-embolique (thromboses veineuses profondes à type de phlébites ou embolies pulmonaires)
Comme nous le verrons, "la Vérité est ailleurs"....
1) la voie cutanée est-elle mieux au niveau hépatique ?
- pour mémoire, l'estradiol oral passe par voie hépatique et subit l'effet de premier passage hépatique qui correspond à la métabolisation primaire de l'estradiol par le foie. A l'inverse, l'estradiol cutané n'est pas soumis à effet de premier passage hépatique
- la question que l'on peut se poser : ce passage hépatique est-il si mauvais que ça? En effet, je rappelle pour mes lectrices assidues que l'estradiol a des effets inducteurs hépatiques en augmentant la synthèse de protéines hépatiques (comme la céruléoplasmine) ou en diminuant la synthèse de certaines protéines hépatiques (comme l'hepcidine).... dont j'ai parlé dans l'analogie entre Alchimie et Hormonologie
- la réponse est donnée par un document publié par le CNGOF (Conseil National des Gynéco-Obsétriciens de France) dont je vous donne le lien
www.cngof.net/Journees-CNGOF/MAJ-GO/livres/2008_GM_135_arnal.pdf
Dans ce document, en page 4, il y a cet extrait de texte intéressant :
"Chez la femme ménopausée, l’administration d’œstrogènes, associés ou non à un progestatif, influence la synthèse hépatique des lipoprotéines, mais également la clairance de certaines lipoparticules, avec une intensité variable en fonction du type et de la dose des œstrogènes utilisés et de leur voie d’administration.
Ainsi, l’ensemble des données de la littérature concordent pour affirmer que l’administration d’œstrogènes par voie orale se traduit par une réduction significative des taux de cholestérol LDL, mais également de Lp(a), et augmente de façon significative les taux de HDL et d’apolipoprotéine A1, mais également de triglycérides [56]. La principale explication de cette élévation du taux de triglycérides sous œstrogénothérapie orale repose sur l’augmentation de la production de particules VLDL de grande taille dont l’effet délétère semble limité en raison d’une épuration hépatique massive limitant leur conversion en lipoparticules athérogènes (VLDL de petite taille, LDL) [64].
Ces effets favorables des œstrogènes sur le métabolisme lipidique sont souvent moins marqués lors de l’administration par voie transdermique, du fait de l’absence de premier passage hépatique. Enfin, si les différents progestatifs ne modifient pas l’effet des œstrogènes sur le cholestérol LDL, l’acétate de médroxyprogestérone atténue leur effet bénéfique sur le cholestérol HDL, ce qui ne semble pas être le cas de la progestérone micronisée [45]"
J'ai surligné en rouge les éléments suivants : il en résulte que E2 par voie orale permet d'améliorer le bilan lipidique de façon considérable :
* en diminuant le risque athérogène lié au cholestérol : augmentation de la fraction de "bon" cholestérol (HDL cholestérol) et diminution du "mauvais" cholestérol (LDL cholestérol et Lp(a))
* en augmentant l'élimination des triglycérides associée aux particules à haut risque athérogène (particules dites VLDL)
Cet effet inducteur hépatique de E2 oral est bien entendu amoindri en cas d'administration cutanée de E2.
Seul hic : augmentation modérée des triglycérides donc à surveiller en cas de troubles métaboliques associés (diabète)
EN BREF : E2 oral meilleur que E2 cutané
2) augmentation du risque thrombo-embolique de l'estradiol oral ou pas ?
je vous donne le lien vers la base officielle de médicaments : base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr/
Elle permet de lire les fiches de chaque médicament (dont toutes les spécialités à base d'estradiol)
Il en résulte les éléments suivants :
- quelque soit la forme d'administration (orale, cutanée gel ou cutanée patch) : le risque relatif de développer un souci thrombo-embolique est de 1,3 à 3,0
- les facteurs de risque thrombo-embolique sont : âge avancé, obésité sévère (IMC > 30), immobilisation prolongée (ce qui explique l'arrêt du TH en pré et post-op immédiat)
EN BREF : aucune supériorité de E2 cutané sur E2 oral
3) conclusion
Cela montre bien le souci majeur des légendes urbaines médicales sans vérification des données médicales au préalable...
La forme orale est supérieure à la voie cutanée de par l'effet de premier passage hépatique en voie orale : E2 a un effet inducteur hépatique et donc diminue le risque cardiovasculaire athérogène sur le versant artériel. En revanche, il y a égalité entre les 2 voies d'administration pour le risque vasculaire sur le versant veineux (risque thrombo-embolique)
A ceci se rajoutent d'autres éléments de supériorité de la voie orale :
- possibilité de déterminer le moment du dosage sanguin, à l'inverse de la voie cutanée où l'absorption est variable
- absorption digestive stable à l'inverse de la voie cutanée qui est soumise aux aléas thermiques (température extérieure froide donc vasoconstriction cutanée d'où moindre absorption cutanée / température extérieure élevée ou effort physique important donc vasodilatation cutanée d'où absorption cutanée augmentée)
- en voie cutanée :
* mention spéciale pour les patchs : risque de décollement en cas de fortes chaleurs
* mention spéciale pour le gel : si vous êtes hétéro, lors de contacts rapprochés avec votre compagnon, vous risquez de lui faire absorber votre E2 gel
Bisous
Mohini